C’est dans ma tête. Privés d’activités physiques : quelles conséquences psychologiques ?
Parmi les privations que les Français, adultes et enfants, doivent supporter depuis un an, il y a celle des activités physiques, et du sport. Des privations qui ne sont pas sans consé-quences sur leur santé, comme l’explique la psychanalyste Claude Halmos.
Les Français, adultes et enfants, sont privés d’activités physiques et du sport depuis presque un an : les salles sont fermées, les activités des enfants supprimées. On parle souvent ici de l’influence qu’ont les privations dues au Covid sur la santé psychologique des Français.
Quelle importance peut avoir la privation d’activités physiques pour les Français ?
Les conséquences psychologiques de la privation d’activités physiques sont souvent sous-estimées, parce que nous vivons dans une tradition de séparation de la tête et du corps. Or cette conception est fausse. La construction d’un être humain se fait dans un rapport permanent entre son corps et sa tête ; et c’est à partir de son corps que son psychisme se construit (ses premiers liens par exemple se tissent, quand il est bébé, avec la personne qui le nourrit et le soigne).
Les émotions qu’il ressent affectent ensuite, toute sa vie, son corps comme sa tête, et il en ins-crit la mémoire dans les deux. Son corps joue donc un rôle très important dans son équilibre psychique (il est important d’ailleurs que les « psys » ne l’oublient pas). Et cela ne concerne pas seulement sa sexualité, mais aussi ses activités physiques.
Elles interviennent de quelle façon ?
Nous avons deux moyens de prendre conscience de nous-mêmes : par le regard, en nous re-gardant dans un miroir, et par les sensations physiques. Se mettre debout, sentir l’appui de ses pieds sur le sol, en étant conscient de sa respiration, permet, en se reconnectant avec son corps et en se sentant à nouveau « dans ses pompes », comme le dit si justement le langage cou-rant, de reprendre possession de soi-même, de se retrouver.
Et cela permet aussi de se régénérer psychologiquement, en sortant de l’écrasement, du tas-sement du corps que provoquent généralement les excès d’angoisse. Et cette opération de ré-génération se réalise, sans que l’on s’en rende compte, dans toutes les activités physiques. Les supprimer ne peut donc que nuire à l’équilibre de ceux qui les pratiquaient.
Et c’est la même chose pour les enfants ?
Les activités physiques sont plus importantes encore pour les enfants. Elles sont nécessaires à leur construction : les enfants ont besoin de développer une intelligence du corps, en même temps qu’une intelligence de l’esprit (être « bon en gym » est aussi important qu’être « bon en maths ») ; mais aussi, pour ne pas s’enfermer dans l’imaginaire, de pouvoir agir avec leur corps autant qu’ils pensent et rêvent avec leur tête.
Elles sont nécessaires aussi à leur épanouissement, parce qu’elles sont une source de plaisir et de confiance en soi. À leur socialisation, grâce aux sports de groupe. Et à leur éducation, parce qu’elles les aident à comprendre à quoi servent le travail, les efforts, et les limites : dans les acti-vités physiques elles sont incontournables, parce que dictées par la nécessité. On ne peut donc que souhaiter, une fois de plus, que toutes ces activités puissent reprendre très vite, et pour tout le monde.
Source : Franceinfo – https://www.francetvinfo.fr